Age : 15 ans et +
Éditeur : PKJ
250 pages
Note :
Une jeune fille décide de se venger de son harceleur en utilisant la même arme que lui : son image.
Au lycée George-Sand, les réseaux sociaux, la réputation et l’apparence règnent en maîtres : chaque geste est observé, commenté, partagé.
Maud et Elina, amies inséparables, tentent d’y mener une vie normale.
Mais tout change lorsqu’un projet d’art les pousse à se dévoiler à travers des courts métrages, entrainant une série d’événements imprévisibles. Alors que l’humiliation publique et virtuelle se propage, les tensions montent dangereusement.
Qui s’en sortira indemne ?
Ne mentons pas, Reel fait partie de ces romans qui mettent mal à l’aise, qui dérangent. Et c’est clairement un effet recherché par l’auteur. Un pari risqué, à double tranchant, qui divisera les lecteurs. D’un côté, ceux qui apprécieront cette plume brute, ce récit déstabilisant, cette plongée dans une vision très sombre de l’adolescence, sous le regard d’adultes dépassés. De l’autre, ceux qui, comme moi, reconnaîtront malgré tout la justesse avec laquelle l’auteur capte une certaine réalité : celle d’une jeunesse qui vit en parallèle, dans un monde régi par les réseaux sociaux. Un univers sans pitié, où l’intimité n’a plus vraiment sa place, et où le lynchage collectif est à portée de clic.
En tant qu’enseignante, j’ai été profondément interpelée par le rôle du professeur d’arts plastiques, M. Scarlatti, dans le drame qui va se jouer. Son comportement, sa posture face aux élèves, le projet de vidéos qu’il lance m’ont paru inadapté. J’ai aussi été troublée par l’inaction de la direction, cette impression qu’aucun adulte ne parvient à prendre la mesure de ce qui se passe. Là encore, c’est une réalité que certains établissements connaissent, et il ne faut pas l’ignorer. Oui, il existe des enseignants sur le fil, et des situations où le cadre éducatif ne tient plus.
Le récit porté par Maud, la narratrice, est sans filtre. Sa manière de raconter les événements qui secouent la classe, les cours d’arts plastiques anarchiques, l’autorité défaillante du professeur comme du principal, les films mis en ligne… tout cela est livré dans un style direct, parfois abrupt. Ce ton peut là encore déranger, mais il sonne aussi très vrai, reflet d’une jeunesse un peu désabusée, qui n’attend plus grand-chose des adultes.
Enfin, Reel questionne, de manière frontale, notre rapport aux réseaux sociaux et à cette culture du spectacle permanent. Violence, voyeurisme, pornographie : les contenus que visionnent ou produisent les élèves vont toujours plus loin. Et si la leçon que veut transmettre M. Scarlatti n’est pas inintéressante, la façon dont il s’y prend tourne rapidement au drame. Son expérience nous rappelle une vérité essentielle : aujourd’hui, tout le monde filme tout, tout le temps. Et ce qui est posté en ligne, même banal, peut vite dégénérer. Surtout, cela laisse une trace, souvent indélébile.