Le Cercle de Dave Eggers

Age : 15 ans et +
Éditeur : Folio  (2013)
570 pages

Note : 5 out of 5 stars

Quand Mae Holland est embauchée par le Cercle, elle n’en revient pas. Ce géant d’Internet relie e-mails, réseaux sociaux et transactions bancaires dans un système universel, clé de voûte d’une société numérique prônant la civilité et la transparence. Mae se passionne pour son nouveau travail – même s’il l’absorbe entièrement, l’éloignant de ses proches, et même si elle s’expose aux yeux du monde en participant au dernier projet du Cercle, une avancée technologique aussi considérable qu’inquiétante… 

Professeur-documentaliste, une grande partie de mon travail consiste à sensibiliser et former les élèves autour de questions devenues centrales dans notre société actuelle : les réseaux sociaux, l’identité numérique, la vie privée, le poids des géants du web, les traces numériques… Des sujets qui sont justement ceux de Le Cercle et qui m’ont donc conduit à lire ce roman lorsque j’ai appris son existence, quelques semaines avant la sortie de son adaptation cinématographique.

Dave Eggers imagine un terrifiant mais très juste roman d’anticipation dans lequel une entreprise, ressemblant à s’y méprendre aux géants du web comme Google Facebook ou Apple, prend le contrôle de nos vies. Une critique glaçante mais particulièrement pertinente qui nous rappelle à quel point les réseaux sociaux ont changé notre rapport à la vie privée. Toute la question étant de savoir jusqu’où nous sommes prêts à aller, notamment sous la pression du collectif (pas toujours bienveillant).

Le personnage de Mae, jeune provincial fraîchement embauché au “service client” de la célèbre société est un prisme intéressant par lequel le lecteur découvre les agissements et les limites de cette société. Le Cercle commence par nous faire rêver avant  que l’on comprenne que ses méthodes et son fonctionnement ressemblent à ceux d’une secte. Ainsi, Mae se laisse de plus en plus accaparée et incapable de résister à l’emprise du Cercle, au point de finir par lui donner ce qu’elle a de plus précieux : sa vie intime.
Jusqu’au bout le lecteur espère un sursaut de ce personnage principal, horrifié par son évolution, mais celui-ci ne viendra pas. C’est aussi cet absence de rébellion chez Mae qui suscite la notre.

Si on peut reprocher au roman de n’être pas toujours porté par une dynamique, d’avoir un personnage principal interchangeable et de surtout mettre en scène la puissance malfaisante de cette société, Le Cercle est aussi  excellent pour nous interpeller sur un thème actuel. Il nous amène ainsi à nous questionner sur les conséquences perverses de l’omniprésence des nouvelles technologies dans notre quotidien. Perte de vie privée et mise en danger des libertés individuelles sont les deux menaces principalement pointées par Dave Eggers. Sur ce dernier point, on pourra dire que l’auteur a su trouver le bon équilibre entre le crédible et ce qui ne relève encore que du possible. Son regard est dérangeant à l’image de 1984 de George Orwell, avant lui. Le but de l’auteur est clairement d’espérer de ses lecteurs un sursaut. Un livre visionnaire donc ?  je serai sur ce point plus mesurée. En effet, si Le Cercle m’a tant interpellée et secouée c’est aussi parce que tout au long de ma lecture je n’ai pas pu m’empêcher de me demander à quelle moment commençait vraiment la fiction. N’est-il finalement pas déjà trop tard ?

En quelques mots :

En suivant l’intégration et les premiers pas de Mae Holland au sein de Le Cercle, le lecteur s’immisce dans les arcanes d’une société dont le but est ni plus, ni moins que de mettre fin à la vie privée. Aussi angoissant et glaçant que 1984 de George Orwell, le roman de Dave Eggers est une critique à peine voilée des ambitions actuelles des géants du web. Le roman est terrifiant non pas pour ce qu’il nous dit d’un possible futur, mais plutôt pour ce qu’il nous apprend de notre monde d’aujourd’hui, et en particulier notre propension à vouloir toujours partager plus notre vie en ligne.

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